La dissolution sans liquidation, plus communément appelée "transmission universelle de patrimoine" (TUP), est une procédure simplifiée de dissolution applicable aux sociétés dont l'associé unique est une autre société. Elle permet ainsi à une société "mère" d'absorber sa filiale, tout en évitant les lourdes formalités liées à une procédure de liquidation.
La TUP est une forme de dissolution sans liquidation prévue par l'article 1844-5 du Code civil. Elle intervient en cas de dissolution d'une société dont 100% des parts ou actions sont détenues par une autre société (dite "société mère" ou "holding"). Elle concerne donc principalement les sociétés unipersonnelles (avec un associé unique) comme l'EURL et la SASU.
Bon à savoir : la TUP est impossible si l'associé unique est une personne physique (particulier). Dans ce cas, il faut obligatoirement procéder à une liquidation de la société.
La TUP se traduit par le transfert de la totalité du patrimoine de la société absorbée, composé de l'ensemble de ses actifs (biens, immeubles, équipements, marques, brevets...) et de ses dettes, à la société absorbante. On parle de confusion des patrimoines des deux sociétés.
Cette procédure entraîne également le transfert automatique des obligations et contrats de la société absorbée à la société absorbante. Cependant, certains contrats contiennent une clause dite intuitu personae limitant la possibilité de les transférer à une autre personne. En présence d'une telle clause, l'accord du cocontractant est requis pour transférer le contrat.
La TUP entraîne alors la dissolution automatique, c'est-à-dire la fermeture et la disparition, de la société absorbée.
L'intérêt principal de cette procédure est sa simplicité. En effet, elle permet d'éviter les formalités liées à la liquidation de la société absorbée : nomination d'un liquidateur, réalisation des opérations de liquidation (vente des actifs et paiement des dettes), clôture des comptes...
Bien qu'elle s'en rapproche, cette procédure est également plus simple que la fusion simplifiée, laquelle requiert notamment la rédaction et le dépôt au greffe d'un traité de fusion. À l'inverse, la rédaction d'un traité de fusion n'est pas requise dans le cadre d'une TUP.
Pour réaliser une dissolution par TUP, il convient de suivre la procédure suivante :
1. Tout d'abord, la société mère (absorbante) doit établir et signer un procès-verbal de dissolution sans liquidation de sa filiale (absorbée).
2. La décision de dissolution doit ensuite faire l'objet d'une publication dans un journal d'annonces légales, dans le département de la société absorbée.
3. Un fois cette publication effectuée, il faut déclarer la dissolution auprès du Guichet des formalités des entreprises.
4. La publication de la TUP ouvre un délai de 30 jours pendant lequel les créanciers de la société absorbée peuvent faire opposition à la dissolution. Au terme de ce délai de 30 jours, un certificat de non-opposition est à demander au greffe du tribunal de commerce.
5. Au moyen de ce certificat de non-opposition, il convient de demander la radiation de la société absorbée sur le Guichet des formalités des entreprises.
6. Si la TUP s'accompagne d'un transfert d'immeuble, un exemplaire supplémentaire de la décision devra être déposé auprès d'un notaire qui se chargera des formalités de publicité foncière.
Bon à savoir : la décision de dissolution n'est plus soumise à enregistrement au service des impôts depuis le 1er janvier 2020. Il existe une exception lorsque la TUP entraîne la transmission d'un bien immobilier. Dans ce cas, la TUP est obligatoirement soumise dans les 2 mois à la double formalité d'enregistrement fiscal et de publicité foncière (voir ci-après).
Régime de faveur des fusions
En principe, la dissolution d'une société est soumise au régime fiscal de la cessation d'entreprise, qui rend immédiatement imposable les bénéfices, provisions et plus-values non encore taxées.
Dans le cadre d'une TUP, la société absorbante (la société mère) peut opter pour le régime de faveur des fusions prévu par l'article 210 A du Code général des impôts. Ce régime permet de limiter le coût fiscal de l'opération.
Il se traduit notamment par les avantages suivants :
Exemple de boni de fusion : La société A possède 100 % du capital de la société B. Au bilan de la société A, cette participation est inscrite pour une valeur de 10 000 euros. Après dissolution de la société B, l'ensemble de ses actifs est absorbé par la société A pour une valeur totale de 15 000 euros. Le boni de liquidation est égal à 15 000 - 10 000 = 5 000 euros.
Ce régime de faveur est optionnel. Pour en bénéficier, la société mère doit l'indiquer dans sa décision de dissolution, et respecter les obligations comptables prévues par l'article 210 A du Code général des impôts. Ces obligations doivent permettre ultérieurement l'imposition à son nom des plus-values et provisions exonérées au moment de l'opération.
Rétroactivité
La société mère peut choisir de donner à la TUP un effet rétroactif sur le plan fiscal. Dans ce cas, la date d'effet de la TUP prise en compte par l'administration fiscale sera antérieure à sa véritable date de réalisation. La date rétroactive est généralement fixée au premier jour de l'exercice en cours.
L'intérêt est de permettre à la société mère, à compter de la date de départ de la rétroactivité, de reprendre à son compte et d'englober dans son propre résultat imposable, le résultat (bénéfice ou déficit) de la société absorbée.
Le point de départ de la rétroactivité ne peut être antérieur à la date de l'ouverture de l'exercice en cours de la société mère et de la société dissoute, au moment de la décision de dissolution.
Attention : la rétroactivité n'est valable que pour l'administration fiscale. À l'égard des tiers, la TUP ne prend effet qu'à l'issue du délai d'opposition de 30 jours après la publication de la dissolution. Les deux sociétés doivent donc respecter séparément leurs obligations comptables jusqu'à cette date, après laquelle les comptes des deux sociétés seront fusionnés.
Taxe sur la valeur ajoutée
L'article 257 bis du Code général des impôts dispense de TVA les opérations de TUP.
Par ailleurs, l'éventuel crédit de TVA dont dispose la société absorbée peut être transféré à la société mère.
Transmission d'immeuble
Lorsque la TUP entraîne la transmission d'un immeuble, elle est obligatoirement soumise, dans les 2 mois de l'opération, à la double formalité d'enregistrement fiscal et de publicité foncière (dite "formalité fusionnée"). Cette formalité donne lieu au paiement de la taxe de publicité foncière au taux de 0,715 % sur la valeur de l'immeuble.