Créer une SARL : caractéristiques et fonctionnement

Dernière révision : Dernière révision :15 juillet 2019
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La société à responsabilité limitée (SARL) est aujourd'hui l'une des structures juridiques les plus utilisées par les entrepreneurs qui souhaitent créer leur société. Elle permet à ses fondateurs de limiter leur responsabilité à leurs apports, et de bénéficier de la sécurité de règles d'organisation et de fonctionnement définies par le Code de commerce. Cette rigidité doit toutefois être prise en compte par les associés qui ne pourront déroger à certaines dispositions obligatoires, relatives notamment aux règles de prises de décisions collectives, ou la tenue d'une assemblée annuelle d'approbation des comptes. Enfin, la question fiscale, et notamment du régime social de son dirigeant, peut se révéler déterminante dans le choix de cette structure.

1. Les éléments constitutifs de la SARL

La SARL est constituée par la volonté d'une ou plusieurs personnes de créer une société disposant de son patrimoine propre. Pour cela ils doivent en rédiger les statuts, qui fixeront l'objet de la société, le montant de son capital social et la répartition des parts entre les associés, ainsi que la dénomination de la société, l'adresse de son siège social et sa durée (en général 99 ans avec possibilité de prorogation).


Nombre d'associés - La SARL peut être constituée par une ou plusieurs personnes physiques (particuliers) ou morales (société ou association). Il n'y a pas de nombre minimum d'associés. Lorsque la SARL est constituée par un associé unique, on parle d'entreprise unipersonnelle à responsabilité limitée (EURL). Il s'agit d'une différence d'appellation, mais le régime applicable est identique (la SARL peut librement passer d'un à plusieurs associés sans transformation). En revanche, la SARL ne peut pas avoir plus de cent associés.


Objet social - Les statuts de la SARL doivent obligatoirement préciser son objet social. L'objet social délimite le champ des activités exploitées par la société. C'est notamment lui qui permet de définir l'étendue des pouvoirs et des fonctions du dirigeant. Lorsque le dirigeant dépasse le cadre de l'objet social dans l'exercice de ses fonctions, il est possible de mettre en cause sa responsabilité personnelle. En revanche on considère que la société reste engagée vis à vis des tiers même en cas de dépassement de fonction.

L'objet social peut être une activité commerciale (par exemple de fabrication, vente, service, etc.) ou civile (par exemple la gestion d'un immeuble). Il est librement défini par les associés, sous réserve de respecter les interdictions légales, qui concernent principalement les activités d'assurance, de capitalisation et d'épargne qui ne peuvent pas être exploitées sous la forme SARL.

En outre, certaines activités sont réglementées et nécessitent une autorisation administrative, voire une habilitation des associés et/ou dirigeants (activités du secteur pharmaceutique, experts-comptables, architectes, agences de voyages...). La liste des activités réglementées est consultable sur le site guichet-entreprise.


Capital social et apports des associés - Le montant du capital social est obligatoirement indiqué par les statuts de la SARL. Il est librement fixé par les associés, sur la base des apports qu'ils réalisent. Il n'existe pas de montant minimum pour constituer une SARL (un capital social d'un euro est donc possible).

Le capital social est divisé en parts sociales d'égales valeurs, distribuées entre les associés en proportion de leurs apports. Une part sociale représente un titre de propriété sur le capital de la société. Il donne droit à une part du bénéfice distribué, ainsi qu'un droit de participation aux décisions collectives.

Les apports effectués par les associés peuvent être réalisés en numéraire (versement d'une somme d'argent), ou en nature (transfert de la propriété d'un bien mobilier ou immobilier). L'une des principales obligations des associés lorsqu'ils s'engagent à constituer une société est de libérer leurs apports, c'est-à-dire de les remettre entre les mains du dirigeant de la société.

  • Les apports en numéraire sont versés sur un compte bancaire bloqué, ouvert au nom de la société avant sa constitution. Le versement toutefois peut être différé. Dans ce cas les associés doivent tout de même verser au moins 1/5e du capital à la création de la société, et s'engager à verser le surplus dans les cinq ans suivant l'immatriculation de la SARL au registre du commerce et des sociétés. Les fonds déposés ne peuvent être retirés par le gérant qu'après immatriculation de la société au RCS. A défaut d'immatriculation dans le délai de six mois à compter du dépôt, l'apporteur est libre de retirer son apport.
  • les apports en nature doivent être transférés à la société dès sa constitution. Ils ne peuvent être différés. La valeur de ces apports doit également faire l'objet d'une évaluation. En principe cette évaluation est réalisée par un commissaire aux apports, choisi à l'unanimité des associés parmi les commissaires aux comptes inscrits sur liste. L'intervention d'un commissaire peut être écartée par décision des associés si aucun apport en nature n'excède la valeur de 30 000 € et si la valeur totale des apports en nature n'excède pas la moitié du capital social. Dans ce cas les associés évaluent eux-mêmes, à l'unanimité, la valeur des apports en nature. Cette évaluation engage la responsabilité des associés pendant cinq ans.

Remarque : un associé peut également réaliser un apport en industrie, c'est-à-dire s'engager à fournir une prestation ou un travail auprès de la SARL en échange de parts sociales. Toutefois ces parts ne sont pas comptabilisées dans le capital social, et elles ont une durée limitée. Il est en outre impossible de les céder ou de les transmettre.

2. Le fonctionnement de la SARL

Pouvoirs du gérant - La SARL est dirigée par un ou plusieurs gérants, obligatoirement personnes physiques, associés ou non. Ils sont nommés par les associés, selon les règles fixées par les statuts. En pratique, la nomination et la destitution du gérant a lieu par décision ordinaire des associés, c'est-à-dire par un vote de plus de la moitié des parts sociales (voir ci-après).

Le gérant a les pleins pouvoirs pour conduire les activités de la société, et accomplir tous les actes nécessaires à la réalisation de son objet social (conclusions de contrats, recherches de financement bancaire, conclusion de bail, etc.). Les statuts peuvent toutefois prévoir des limitations de pouvoirs, par exemple en fixant un seuil de montant d'emprunt au-delà duquel l'autorisation préalable des associés est requise.

Remarque - Le commissaire aux comptes est un expert indépendant, nommé par les associés, qui a pour mission de contrôler la sincérité et la régularité des comptes de la société. Sa nomination est facultative pour les PME. La loi PACTE a en effet relevé les seuils en dessous desquels la nomination du commissaire aux comptes est facultative, soit :

(i) un bilan annuel inférieur à 4 000 000 € ;

(ii) un chiffre d'affaires HT inférieur à 8 000 000 € ; et

(iii) un nombre de salariés inférieur à 50.


Décisions collectives des associés - La loi ou les statuts de la société imposent pour certaines décisions un vote obligatoire des associés. Ce vote a lieu en assemblée, ou par consultation écrite si les statuts l'autorisent. Attention : la consultation écrite est impossible pour les décisions relatives à l'approbation annuelle des comptes, qui sont obligatoirement prises en assemblée (lire notre article à ce sujet).

Remarque - C'est la gérance de la SARL qui a l'initiative et la responsabilité de provoquer la décision collective aux associés, et notamment de les convoquer à l'assemblée. Toutefois les associés qui détiennent 50% des parts sociales, ou qui représentent 1/10e des associés, peuvent lui demander la réunion d'une assemblée. Dans ce cas, si la gérance refuse de convoquer l'assemblée, les associés peuvent demander au président du tribunal de commerce la désignation d'un mandataire chargé de convoquer l'assemblée et de fixer son ordre du jour.

Lors du vote de la décision, chaque associé dispose d'un nombre de voix égal au nombre de parts sociales qu'il possède. En ce qui concerne les règles de majorité applicables, il faut distinguer les prises de décisions extraordinaires et ordinaires :

  • Les décisions collectives extraordinaires concernent toute décision entraînant une modification des statuts. Il s'agit par exemple d'une modification du capital social, de la répartition des parts sociales entre les associés, ou même de la dissolution de la société.
    • Quorum : pour être valable, une décision extraordinaire doit réunir au moins 1/4 des parts sociales composant le capital à la première convocation. Si ce quorum n'est pas atteint, une deuxième convocation a lieu, qui devra réunir au moins 1/5e des parts.
    • Majorité : la décision extraordinaire est prise par une majorité représentant au moins les 2/3 des parts sociales des associés participants.

Remarque - Les statuts peuvent prévoir un quorum ou une majorité plus élevés (sans pouvoir demander l'unanimité).

  • Les décisions collectives ordinaires concernent toutes les autres décisions qui n'entraînent pas de modification des statuts. Il s'agit des décisions portant sur l'approbation des comptes, l'autorisation de la gérance d'effectuer une opération soumise à autorisation, la nomination des gérants et leur rémunération, ou l'approbation des conventions conclues entre la société et l'un de ses gérants ou associés.
    • Quorum : aucun quorum n'est exigé pour ces décisions.
    • Majorité : la décision ordinaire est prise à la majorité absolue, soit plus de la moitié des parts sociales composant le capital social. Si la majorité absolue n'est pas obtenue, une deuxième convocation a lieu. Dans ce cas, c'est la majorité relative qui l'emporte, soit la majorité des voix émises (quel que soit le nombre de participants).

Remarque - Les statuts peuvent imposer une majorité plus élevée.

  • Certaines décisions spécifiques requièrent l'unanimité des associés : il s'agit du changement de nationalité de la société, de sa transformation en société par actions simplifiée, en société en nom collectif ou en société en commandite, de l'augmentation de l'engagement des associés (c'est-à-dire l'aggravation de leur dette envers la société ou envers les tiers), et de l'absorption de la SARL par une SAS.


Assemblée annuelle obligatoire - Chaque année dans les six mois de la clôture des comptes de l'exercice, une assemblée générale doit obligatoirement se réunir pour se prononcer sur les comptes sociaux. Quinze jours au moins avant la réunion, le gérant doit adresser aux associés les documents nécessaires au vote : le rapport de gestion, le bilan de la société, le compte de résultat et son annexe, ainsi que le texte des résolutions proposées (lire notre article à ce sujet).


Agrément d'un nouvel associé - Les cessions de parts entre associés de la SARL sont libres, et ne nécessitent pas d'autorisation des autres associés. En revanche la cession de parts à un tiers étranger à la société est soumise à l'agrément de tous les associés. Les associés peuvent donc, dans une certaine mesure, s'opposer à l'entrée d'un nouvel associé au capital de la société.

  • Majorité : l'agrément est soumis à une double majorité. Il doit être donné par la majorité des associés, représentant au moins la moitié des parts sociales (l'associé qui cède ses parts participant également au vote).

La loi prévoit toutefois des exceptions pour lesquelles la cession de parts sociales est libre et ne nécessite pas d'agrément. C'est le cas :

  • pour les cessions à un conjoint, ascendant ou descendant ; et
  • pour les transmissions de parts dans le cadre d'une succession bénéficiant au conjoint, à un ascendant ou un descendant.

Remarque - Les statuts peuvent imposer un agrément pour les cessions intrafamiliales.

3. Règles fiscales et sociales applicables à la SARL

Statut social du dirigeant - le gérant associé majoritaire (ou associé unique) est affilié à la sécurité sociale des indépendants (ex RSI). Le gérant associé minoritaire (ou égalitaire), ou le gérant non associé, est rattaché au régime général de la sécurité sociale en tant qu'assimilé salarié.

Remarque - La fonction de gérant ne peut faire l'objet d'un contrat de travail. Il est toutefois possible de cumuler le mandat de gérant avec un contrat de travail, à condition que les deux statuts portent sur des fonctions distinctes : la fonction technique associée au contrat de travail doit donc être clairement séparée de la fonction de dirigeant. Il en va de même pour la rémunération qui doit être distincte pour chaque fonction. Dans ce cas la révocation du mandat de gérant n'entraîne pas la résiliation du contrat de travail qui se poursuit normalement.


Imposition de la société à l'IS - Par défaut la SARL est imposée à l'impôt sur les sociétés. Cet impôt est calculé sur le bénéfice imposable, et son taux dépend du montant de bénéfice généré :

  • 15% sur les bénéfices inférieurs à 38.120 € ;
  • 28% sur les bénéfices entre 38.120€ et 500.000 € ; et
  • 31% après 500.000€ de bénéfices.


La SARL peut bénéficier d'un taux réduit à 15% lorsqu'elle remplit les conditions suivantes :

  • Son chiffre d'affaires est inférieur à 7.630.000 € ;
  • Son capital social est entièrement libéré ; et
  • Les 3/4 des parts sociales sont détenues par des associés dont le chiffre d'affaires est inférieur à 7.630.000 €.


Option de l'IR - La SARL peut opter pour le régime de l'impôt sur le revenu. Dans ce cas chaque associé est imposé à titre personnel, et doit inclure dans sa déclaration de revenus la part des bénéfices de la société qui lui revient de droit (même si ce bénéfice n'a pas été distribué en dividendes).

Exemple - M. Dupont est détenteur de 50% des parts sociales d'une SARL qui a généré un bénéfice de 100 000 € sur l'année 2018. Il devra comptabiliser dans sa déclaration d'impôt sur le revenu 2018 la part des bénéfices qui lui revient, soit 50.000 €.


Cette option n'est possible que si la SARL remplit les conditions suivantes :

  • elle exerce à titre principal une activité industrielle, commerciale, artisanale, agricole ou libérale, à l'exclusion de la gestion de son propre patrimoine mobilier ou immobilier ;
  • elle n'est pas cotée en bourse ;
  • elle emploie moins de 50 salariés ;
  • elle réalise un chiffre d'affaires annuel ou un total de bilan inférieur à 10 M€ ;
  • elle a été créée depuis moins de 5 ans à l'ouverture de l'option ;
  • ses droits de vote sont détenus, à hauteur de 50 % au moins, par une ou des personnes physiques ;
  • ses droits de vote son détenus, à hauteur de 34 % au moins, par une ou plusieurs personnes ayant la qualité de gérant.

L'option pour ce régime nécessite l'accord de tous les associés. Il est limité à une durée de 5 ans.

Julien Poirée

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